L’année 2024 marque, sans aucun doute, l’une des périodes les plus tragiques de l’Histoire d’Haïti. Le pays, déjà en proie à une insécurité chronique, a vu ses infrastructures de santé, ses hôpitaux et ses services publics attaqués, laissant la population dans une détresse inimaginable.
Les attaques contre les hôpitaux se sont multipliées tout au long de l’année 2024, le plus emblématique reste celle de l’Hôpital Général de Port-au-Prince ce 24 décembre 2024 ayant causé la mort de deux journalistes et d’un policier. Il s’agit du plus grand établissement de santé du pays, où des gangs ont pris le contrôle des lieux, forçant l’évacuation de patients et de médecins. Après plusieurs mois d’occupation par les criminels, les services de l’Hôpital Général sont toujours suspendus à la fin de l’année, malgré les promesses de réouverture faites par le ministre de la Santé, Duckenson Lorthe Blema. Ce dernier avait annoncé que l’hôpital rouvrirait le 25 décembre, comme un « cadeau de Noël » pour la population, mais à ce jour, la situation est toujours aussi catastrophique avec une tentative d’ouverture échouée. Les clés de l’hôpital étant toujours entre les mains des gangs.
D’autres hôpitaux n’ont pas été épargnés, comme l’Hôpital Bernard Mevs, incendié par des bandits en décembre 2024, après avoir été menacé de destruction plusieurs jours avant. À l’Hôpital Saint-Michel de Jacmel, les activités ont été paralysées par des grèves de travailleurs qui réclamaient des arriérés de salaire. Pendant ce temps, à l’Hôpital Sanatorium, les patients ont été contraints de fuir en raison de la menace des gangs. Les autorités ne semblent jamais à la hauteur face à cette violence systématique.
À ce jour, il n’existe pas presque d’hôpitaux pour les femmes enceintes et plus de 30 centres hospitaliers dans la capitale haïtienne sont attaqués selon Frantz Duval.
Cette année a également été marquée par des massacres à travers le pays. Le 20 décembre, plus de 200 personnes ont été tuées à Wharf Jérémie, dans une violence aveugle exacerbée par l’absence d’une réponse gouvernementale adéquate. Le Premier ministre, Alix Didier Fils-Aimé, a condamné cet acte, mais comme toujours, aucune mesure concrète n’a été prise pour prévenir de tels actes. Le gouvernement semble être totalement dépassé par la situation, incapable de protéger ses citoyens et d’assurer la sécurité de ses infrastructures vitales.
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Les habitants de Cité Soleil, Pont Sondé, Petite Rivière de l’Artibonite et d’autres zones chaotiques du pays vivent dans une terreur permanente. Les forces de l’ordre sont absentes ou inefficaces, et les bandits, souvent mieux armés, dictent leur loi. Le Conseil Présidentiel de Transition (CPT), qui détient le pouvoir en Haïti, continue de prendre des décisions en dehors de toute logique de protection de la population. Bien que le CPT dispose de millions de gourdes pour financer les services de renseignement et la sécurité, ces fonds sont souvent détournés ou mal utilisés. Pendant ce temps, les Haïtiens, en particulier les plus vulnérables, subissent les conséquences de cette gestion catastrophique.
Une autre dimension de cette crise est la gestion inégale des infrastructures de santé. Alors que des efforts rapides ont été mis en place pour réhabiliter l’Hôpital Bernard Mevs, un établissement privé, les autorités continuent de laisser l’Hôpital Général, un pilier public de la santé, à la merci des bandits. Le gouvernement a alloué des fonds pour réhabiliter cet hôpital privé en moins de 72 heures, tandis que l’Hôpital Général reste fermé, privant des milliers de personnes de soins médicaux essentiels.
Outre la violence et l’instabilité sécuritaire, l’économie haïtienne a été gravement affectée par la situation. Les principaux axes routiers ont été bloqués par les gangs, rendant les déplacements à travers le pays presque impossibles. Les marchés publics se sont effondrés, et la situation économique est devenue de plus en plus désastreuse. La Commission Économique pour l’Amérique Latine et la Caraïbe (CEPAL) prévoit une 7ème année consécutive de contraction du PIB pour Haïti. La performance, selon la CEPAL, sera négative en 2025 soit -0.5% contre 1% prévu dans le décret budgétaire adopté par l’ancien gouvernement Conille.


En fin de compte, ce qui caractérise le plus cette année 2024, c’est le manque de leadership du gouvernement en place. Dirigé par un Premier ministre de facto, sans mandat populaire ni légitimité constitutionnelle, ce gouvernement n’a pas pu répondre aux attentes de la population, ni aux besoins fondamentaux du pays. Tandis que des groupes armés continuent de prendre le contrôle de quartiers entiers et de massacrer des innocents, 80 % de la région métropolitaine de Port-au-Prince est contrôlée par les gangs avec plus d’un demi-millions de personnes déplacées. Le pire, selon la Francophonie, depuis Janvier 2024, 44 % de la population se trouve dans une situation d’insécurité alimentaire sous la menace de plus 300 bandes criminelles.
Il est désormais évident que 2024 est l’une des pires années de l’Histoire d’Haïti. Les crimes se multiplient, les hôpitaux sont attaqués, et l’économie s’effondre. Les promesses du gouvernement sont restées lettre morte, et les Haïtiens continuent de vivre dans la peur et la souffrance.