La DGI face au spectre de la corruption

En Haïti, la Direction Générale des Impôts (DGI), institution clé dans le financement des services publics, traverse une crise sans précédent. Grèves prolongées, baisse des recettes fiscales et rumeurs de corruption plongent cette structure dans une situation explosive. Au cœur des tensions : le choix imminent d’un nouveau directeur général, qui suscite une vive opposition parmi les employés.

Des employés en grève pour l’intégrité

Depuis plusieurs mois, les employés de la DGI sont mobilisés, exigeant la nomination d’un directeur général intègre. Leur mécontentement s’est intensifié face à des rumeurs selon lesquelles un candidat accusé de détournement de 72 millions de gourdes serait pressenti pour prendre la tête de l’institution. Selon des informations relayées par divers médias, ce dernier aurait été révoqué de son poste précédent et contraint d’hypothéquer sa maison pour rembourser la somme détournée.

Les grévistes refusent tout compromis. Ils conditionnent la reprise des activités à la désignation d’un dirigeant au-dessus de tout soupçon, insistant sur la nécessité de préserver l’intégrité d’une institution déjà fragilisée par des scandales.

Cette crise interne survient dans un contexte particulièrement difficile pour la DGI. La grève, entamée en septembre 2024, a bloqué la collecte des impôts pendant près de deux mois, aggravant la situation financière de l’État. Sur un objectif de 14,5 milliards de gourdes pour octobre et novembre, seulement 46 % des recettes prévues ont été collectées, mettant en péril le financement des services publics essentiels.

La paralysie de la DGI s’inscrit dans un cadre plus large de défaillances systémiques. Outre les accusations de corruption, les employés dénoncent un manque d’outils de travail adéquats et l’absence de formations nécessaires pour moderniser les services fiscaux.

L’influence du secteur privé en question

Un autre aspect préoccupant de cette crise est l’influence croissante de certaines sphères du secteur privé sur les décisions stratégiques des institutions publiques, notamment la DGI et l’Administration Générale des Douanes (AGD). Cette mainmise soulève des inquiétudes quant à l’indépendance de ces entités essentielles pour les finances publiques haïtiennes. Certains observateurs avertissent qu’un transfert de contrôle au secteur privé pourrait porter un coup fatal à l’État haïtien, déjà affaibli par des années de mauvaise gouvernance et de crise politique.

Alors que les négociations entre les grévistes et le gouvernement ont permis une reprise temporaire des activités jusqu’à la fin de l’année, les tensions restent palpables. Les employés maintiennent leur exigence de transparence et d’intégrité dans la nomination de leur futur directeur général.

Pour éviter une reprise de la grève, le gouvernement devra faire preuve de fermeté contre la corruption et engager des réformes structurelles pour restaurer la crédibilité de la DGI. Sans cela, l’institution risque de s’enliser davantage, avec des conséquences économiques et sociales désastreuses pour le pays.

En définitive, la crise à la DGI illustre les défis profonds auxquels Haïti est confrontée : un système fiscal vulnérable, une gouvernance fragilisée par des intérêts privés, et une population exaspérée par l’impunité. Le choix du prochain directeur général sera un test décisif pour l’État haïtien, appelé à démontrer sa capacité à résister aux pressions et à redresser une administration en pleine dérive.

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