Alors que Leslie Voltaire, Président du Conseil présidentiel de transition, sollicite officiellement l’aide du Venezuela pour faire face à la crise sécuritaire et humanitaire en Haïti, cette démarche suscite des interrogations sur les enjeux géopolitiques et les réponses internationales à la crise haïtienne. Cette demande, bien que pragmatique, pourrait accentuer les tensions diplomatiques avec les États-Unis.
Une initiative aux ramifications complexes
Lors du vingtième anniversaire de l’Alliance bolivarienne pour les Amériques (ALBA), Leslie Voltaire a prononcé un discours marquant :
« En ce 14 décembre 2024, alors que nous célébrons le vingtième anniversaire de l’ALBA, je tiens à saluer tous les chefs d’État présents ici, en particulier ceux qui ont contribué à la création de l’ALBA-TCP. Haïti est honoré de participer à cette journée. Actuellement, Haïti est confronté à une vague de violence orchestrée par des bandes criminelles qui terrorisent la population. Dans ce contexte, nous faisons appel à nos frères de l’ALBA pour une assistance en matière de sécurité et d’aide humanitaire, car près de six millions d’Haïtiens traversent une période extrêmement difficile. »
Cette déclaration met en lumière les attentes d’Haïti envers ses partenaires régionaux. Historiquement, le Venezuela avait soutenu Haïti à travers le programme PetroCaribe, dilapidé, volé, pillé par des corrompus qui habitent en grande partie actuellement États-Unis.
Les États-Unis : condamnations verbales et priorités ailleurs
Les réactions américaines aux massacres et violences en Haïti restent majoritairement symboliques. Voici quelques exemples de récents tweets officiels :
- 10 décembre : « L’ambassade des États-Unis condamne le récent massacre de Cité Soleil. Une fois de plus, des gangs criminels, qui représentent 0,1 % de la population haïtienne, ont commis des actes inqualifiables. »
- 9 décembre : « Je suis consterné par les rapports faisant état du massacre d’environ 200 personnes par des gangs en Haïti. Nous exhortons la communauté internationale à renforcer son soutien à la MMSS. »
- 16 décembre : « Les États-Unis saluent la prestation de serment des deux derniers membres du Conseil électoral provisoire (CEP). Nous sommes prêts à collaborer avec le CEP et le gouvernement de transition pour ouvrir la voie à des élections libres et équitables. »
Ces messages, bien que marqués par une rhétorique de soutien, contrastent fortement avec les engagements financiers et stratégiques américains ailleurs. Selon i24 News, les États-Unis allouent chaque année 3,3 milliards de dollars à Israël, et en 2024, ce montant a atteint 14 milliards, selon The Times of Israël. À l’Ukraine, en pleine guerre contre la Russie, des milliards de dollars supplémentaires ont été promis ( Seulement pour ce mois de décembre 2024, les États-Unis annoncent plus de deux milliards de dollars de soutien militaire et humanitaire aux Ukrainiens).
Une géopolitique de l’influence
Pourquoi cette disparité dans l’allocation des ressources ? Les priorités américaines semblent dictées par des considérations stratégiques. Israël et l’Ukraine représentent des intérêts cruciaux dans la politique étrangère américaine, tandis qu’Haïti, bien qu’à proximité immédiate, ne bénéficie pas d’un engagement comparable. Cette dynamique illustre une réalité géopolitique : les droits humains et la stabilité ne sont pas toujours des critères déterminants dans les décisions internationales.
Face à cette situation, l’appel de Voltaire à l’ALBA peut être perçu comme une tentative de diversifier les partenariats. Cette démarche s’inscrit dans une logique pragmatique : si les soutiens traditionnels montrent leurs limites, Haïti doit se tourner vers d’autres alliés, quitte à provoquer des tensions avec Washington. Le Venezuela, malgré ses propres défis, a démontré une capacité à fournir une assistance concrète dans le passé.
La demande d’aide adressée au Venezuela interroge sur le rôle des puissances mondiales dans la gestion des crises régionales. Si les États-Unis insistent sur leur engagement envers la démocratie et les droits humains, leur implication en Haïti reste modeste comparée à leurs investissements ailleurs. Ce contraste soulève des questions sur les priorités et la cohérence de leur politique étrangère.
En sollicitant l’aide du Venezuela, Leslie Voltaire prend un risque diplomatique significatif.