Magalie Habitant, une figure emblématique des dossiers de corruption en Haïti

Magalie Habitant, ancienne directrice générale du Service national de gestion des résidus solides (SNGRS) a été arrêté le jeudi 9 janvier 2025. Escortée par des agents de la Police nationale d’Haïti (PNH) et conduite à la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), cette arrestation suscite une vive réaction dans l’opinion publique. Cependant, les motifs exacts de cette interpellation restent flous, selon une source policière. Cette affaire vient s’ajouter à une longue liste de controverses liées à l’ancienne directrice, dont la gestion au SNGRS a souvent été pointée du doigt pour des irrégularités financières.

En juillet 2021, la Cour des comptes et du contentieux administratif (CSC/CA) émettait un arrêt de débet contre Magalie Habitant et plusieurs membres de son administration selon Ayibopost. Ce décret condamnait ces derniers à restituer au Trésor public la somme de 38 879 776,71 gourdes. Cette décision résultait d’une audit approfondi révélant des anomalies financières graves au sein du SNGRS sous sa direction.

Les investigations ont mis en évidence des transferts illégaux de fonds, notamment 12 millions de gourdes vers une entité fictive dénommée SMCRS/Nord. Aucun document justificatif n’a été fourni à la CSC/CA pour ces transactions. De plus, 11 259 000 gourdes ont été déboursées pour des contrats douteux, tandis que 16 620 700 gourdes ont été mal justifiées. Ces montants étaient supposément affectés à l’achat de pièces détachées et d’autres accessoires.

Malgré un arrêt de débet, cinq mois après, aucun remboursement n’avait été effectué, comme l’a déclaré Napoléon Lauture, chef de l’auditorat à la CSC/CA contacté par Ayibopost. Cette inaction reflète une faiblesse structurelle dans l’application des sanctions judiciaires contre la corruption en Haïti

En vertu du décret du 23 novembre 2005 portant organisation de la CSC/CA, les arrêts de débet doivent être transmis au commissaire du gouvernement, au juge d’instruction, et au doyen du tribunal de première instance compétent. Cependant, aucune action concrète n’avait été entreprise jusqu’à fin 2024 pour avancer sur ce dossier.

La Direction générale des impôts (DGI) est l’instance chargée d’exécuter ces décisions. Selon Napoléon Lauture, « l’État doit se saisir des biens des débiteurs pour recouvrer les fonds détournés » (Ayibopost). Cela inclut la confiscation des biens mobiliers et immobiliers, ainsi que des comptes bancaires en Haïti et à l’étranger. Pourtant, jusqu’à présent, aucune initiative n’a été prise dans ce sens.

Magalie Habitant n’en est pas à son premier scandale. Durant ses 17 mois à la tête du SNGRS, elle a été au cœur de plusieurs affaires douteuses. En 2019, son nom apparaissait dans l’affaire des « mercenaires » lourdement armés appréhendés près de la Banque de la République d’Haïti (BRH). Selon une enquête de The Intercept, ces individus étaient impliqués dans un transfert illicite de 80 millions de dollars, supposément destinés à un compte lié au président Jovenel Moïse. L’un des véhicules utilisés dans cette opération était enregistré au nom de Magalie Habitant (Ayibopost).

En 2020, elle faisait à nouveau les gros titres lorsque des accusations l’impliquaient dans une distribution suspecte d’un million de gourdes prétendument issues d’un projet d’assainissement du SNGRS. Ces fonds auraient été alloués à des animateurs de l’émission « Matin Caraïbes ».

Selon une source policière Hier, les perquisitions au domicile de Magalie Habitant ont duré plusieurs heures avant son transfert à la DCPJ. Ces interventions font suite à de nouvelles accusations liées à des pratiques douteuses de gestion durant son mandat au SNGRS. Si les détails de son arrestation restent à confirmer, cette affaire met en lumière les liens entre corruption, malversation, et impunité systémique dans les institutions haïtiennes.

L’affaire Magalie Habitant est emblématique des défis auxquels Haïti fait face dans sa lutte contre la corruption. Alors que les preuves s’accumulent, le manque de volonté politique et les failles institutionnelles entravent l’application de sanctions efficaces.

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