Le 3 janvier 2025, le Groupe de Travail sur la Constitution (GTC) a remis son rapport final au Dr Louis Naud Pierre, secrétaire exécutif de la Conférence Nationale. Cette cérémonie, tenue en présence de Jerry Tardieu, coordonnateur du GTC, marque la fin de trois mois de travaux axés sur la collecte de propositions en vue d’une révision constitutionnelle. Le document remis contient les contributions de divers acteurs politiques et secteurs organisés de la société haïtienne, offrant une base solide pour les débats futurs.
Un mandat dans un contexte difficile
Créé par décret le 17 juillet 2024, le GTC avait pour mission de consulter les forces vives du pays afin de recueillir des propositions concernant le projet de révision constitutionnelle. Cependant, les travaux du groupe ont été entravés par un contexte politique et sécuritaire complexe.
- Fermeture de l’aéroport et isolement de la capitale : L’insécurité grandissante et les restrictions de déplacement ont empêché les membres du GTC de se rendre dans les provinces pour organiser les assises départementales prévues.
- Climat politique délétère : La méfiance envers les autorités de la transition a conduit certaines entités politiques et civiles à refuser de participer aux consultations.
- Manque de sérénité : Les tensions politiques et les luttes de pouvoir ont rendu difficile une réflexion apaisée sur un sujet aussi sensible que la révision constitutionnelle.
Malgré ces contraintes, le GTC a réussi à consulter un large éventail de parties prenantes, dont des partis politiques, des associations civiles, et des organisations professionnelles, permettant ainsi de recueillir des idées variées.
Recommandations principales : une Assemblée constituante pour légitimer le processus
Le GTC recommande la création d’une Assemblée constituante chargée de délibérer sur un projet de texte constitutionnel avant toute mise au référendum. Selon les membres du groupe, cette approche renforcerait :
- La légitimité démocratique : Une Assemblée constituante permettrait une représentation équitable des différents secteurs de la société haïtienne.
- La transparence : Le processus de délibération garantirait une meilleure acceptation par la population.
- La participation : Elle offrirait aux régions éloignées et à la diaspora une opportunité d’exprimer leurs points de vue.
Le GTC insiste également sur l’importance des assises départementales pour compléter les travaux initiaux et recueillir les contributions des zones souvent marginalisées dans les débats nationaux.
L’urgence d’un consensus national
Le rapport souligne que toute avancée sur la révision constitutionnelle dépendra de l’amélioration de la situation sécuritaire. Jerry Tardieu, coordonnateur du GTC, a appelé les protagonistes de la crise à renouer le dialogue pour établir un consensus national.
- Stabilisation de la sécurité : La priorité des Haïtiens demeure le rétablissement de l’ordre dans un pays où l’insécurité généralisée paralyse les institutions et exacerbe les tensions sociales.
- Dialogue inclusif : Les acteurs politiques doivent collaborer pour surmonter les divisions et parvenir à un accord sur les grandes orientations de la transition.
Un travail inachevé mais prometteur
Le rapport du GTC ne contient pas de projet de texte constitutionnel. Cette décision est motivée par trois raisons principales :
- Respect du mandat initial : Le décret de création du GTC spécifiait une mission de consultation, et non de rédaction.
- Demande des acteurs consultés : Une majorité a exprimé le souhait de voir une Assemblée constituante légitimer le processus.
- Contexte défavorable : Les contraintes logistiques et politiques ont limité la portée des consultations.
Malgré tout, les membres du GTC se disent satisfaits d’avoir pu accomplir leur mission dans des conditions difficiles. Les propositions recueillies, regroupées dans un volumineux rapport, constituent une base précieuse pour alimenter le débat.
Les prochaines étapes : feuille de route pour une réforme réussie
Le GTC propose une feuille de route pour guider les prochaines étapes du processus de révision constitutionnelle :
- Organisation d’une Assemblée constituante : Cette étape est essentielle pour garantir la légitimité du texte final.
- Consultations départementales et auprès de la diaspora : Compléter les travaux par des discussions inclusives dans les régions et avec les communautés haïtiennes à l’étranger.
- Stabilisation du contexte politique et sécuritaire : Sans une amélioration des conditions actuelles, il sera difficile de mobiliser les acteurs nécessaires pour mener à bien cette réforme.
Une opportunité pour une transition réussie
Le rapport du GTC est présenté comme une première étape vers une révision constitutionnelle inclusive et légitime. Les membres espèrent que leurs recommandations serviront de levier pour renforcer la démocratie et stabiliser le pays.
Cependant, le succès de cette entreprise repose désormais sur la capacité des acteurs politiques, sociaux, et institutionnels à collaborer. Comme le rappelle Jerry Tardieu, « une réforme constitutionnelle n’est pas une fin en soi, mais un moyen de créer un cadre institutionnel plus solide et adapté aux réalités de la nation haïtienne ».
Avec cette démarche, le GTC espère avoir jeté les bases d’un processus qui, s’il est mené à terme, pourrait contribuer à redresser le pays et à renforcer sa gouvernance.