Crise à la DGI en Haïti : grèves, revenus fiscaux en baisse et pression sur le gouvernement

La Direction Générale des Impôts (DGI) en Haïti fait face à une crise majeure depuis plusieurs mois. Entre grèves prolongées, sous-performance des recettes fiscales et tensions avec la direction, la situation met à mal le fonctionnement des finances publiques du pays. Cette crise illustre un malaise profond au sein de l’administration fiscale haïtienne, qui impacte directement la capacité de l’État à collecter des ressources indispensables pour ses dépenses publiques.

Une grève paralysante et des revendications persistantes

Le mouvement de grève à la DGI a débuté en septembre 2024, avec des employés exigeant la démission du directeur général, Jean Emmanuel Casséus, accusé de mauvaise gestion et de favoritisme. Cette grève a atteint son apogée en novembre, bloquant totalement les opérations de collecte des impôts pendant près de deux mois.

Malgré des négociations intenses entre les représentants des grévistes et le Ministère de l’Économie et des Finances, un accord de trêve conditionnée a été signé pour permettre une reprise des activités le 25 novembre 2024, jusqu’à la fin de l’année. Cependant, la demande de révocation du directeur général reste une condition non négociable pour de nombreux employés.

« Les employés ont exprimé clairement leur ras-le-bol et refusent que Jean Emmanuel Casséus remette les pieds à la DGI », a déclaré Ketleen Florestal, ministre de l’Économie et des Finances, illustrant l’ampleur de la fracture interne ( Le Nouvelliste).

Impact de la grève sur les recettes fiscales

La grève à la DGI a eu des répercussions dramatiques sur la collecte des impôts. Selon le ministre de l’Économie et des Finances, Alfred Métellus, la DGI avait pour objectif de collecter 14,5 milliards de gourdes pour les mois d’octobre et novembre 2024. Cependant, en date du 7 novembre, seules 6,7 milliards de gourdes avaient été encaissées, soit à peine 46 % des recettes prévues. Cette baisse des recettes met en péril les finances publiques et réduit la capacité du gouvernement à soutenir les populations vulnérables, notamment à l’approche des fêtes de fin d’année.

« Le gouvernement a besoin de ressources pour aider les familles nécessiteuses. Chaque gourde manquante réduit notre capacité à soutenir les plus vulnérables », a souligné Alfred Métellus dans un plaidoyer en faveur de la reprise des activités fiscales.

Une situation explosive au sein de la DGI

Outre les revendications salariales, la frustration des employés de la DGI s’est aussi cristallisée autour de la répartition inégale des bénéfices. Selon Ketleen Florestal, une disparité marquée existait entre les avantages accordés à la haute direction et les montants reçus par les employés de base. Pour apaiser la colère, le gouvernement a décidé d’accorder une prime de 50 000 gourdes aux employés à faible revenu en début d’exercice, tout en travaillant à une révision complète de la grille salariale.

Cependant, cette tentative de réforme n’a pas suffi à calmer les tensions. La réouverture des bureaux de la DGI, prévue le 25 novembre, est conditionnée à la non-présence de Jean Emmanuel Casséus à son poste, un ultimatum lancé par les grévistes. Une situation qui laisse planer un doute sur la stabilité des services dans les mois à venir.

Une administration fiscale en crise : symptômes d’une défaillance systémique

La crise à la DGI n’est pas seulement une question de leadership, mais le reflet d’une défaillance plus profonde dans l’administration publique haïtienne. Le système fiscal est affaibli par le manque d’outils, la corruption et la mauvaise gestion. Les grévistes accusent la direction de la DGI de négliger les besoins essentiels des employés, notamment en termes d’outils de travail et de conditions de formation.

« Nous avons constaté une absence d’outils adéquats et un manque de formation pour des services cruciaux comme la direction du domaine et de l’enregistrement, ce qui freine les transactions économiques du secteur privé », a déclaré la ministre Ketleen Florestal.

Conséquences économiques et sociales de la crise

La paralysie de la DGI a eu des conséquences graves pour l’économie haïtienne. La baisse significative des recettes fiscales met en danger le financement des services publics essentiels. Cette situation exacerbe la précarité sociale, dans un pays déjà fragilisé par l’insécurité, la violence des gangs et la crise politique persistante. La réduction des revenus publics limite également la capacité de l’État à investir dans des programmes de développement, aggravant ainsi la situation des familles les plus démunies.

Tentatives de résolution : vers une sortie de crise ?

Pour apaiser la situation, les autorités ont accepté plusieurs concessions, notamment des primes pour les employés et des révisions budgétaires pour corriger les inégalités salariales. Une trêve a été conclue jusqu’au 31 décembre 2024, permettant la reprise temporaire des activités de la DGI. Cependant, la pression reste forte pour remplacer le directeur général actuel, et les grévistes menacent de reprendre la grève si leurs revendications ne sont pas satisfaites.

« Si les employés honorent leur part de la négociation, la grève sera terminée. Mais je ne peux pas promettre ce que je ne peux pas offrir », a déclaré Ketleen Florestal, soulignant les limites des négociations en cours.

Enfin!

La crise à la DGI en Haïti illustre les défis complexes auxquels le pays est confronté en matière de gouvernance et de gestion des finances publiques. Les tensions entre les employés, la direction et le gouvernement révèlent un système fragilisé par des années de mauvaise gestion et de corruption. Alors que la trêve actuelle donne un peu de répit, la situation reste précaire et les prochains mois seront décisifs pour l’avenir de l’administration fiscale haïtienne. Le gouvernement devra non seulement résoudre la crise actuelle, mais également s’attaquer aux racines profondes des dysfonctionnements pour éviter de nouvelles perturbations.

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