Dans le cadre du gel de l’aide étrangère ordonné par Donald Trump, plusieurs experts en sécurité travaillant en Haïti sous contrat avec le gouvernement américain ont été mis en congé forcé. Cette mesure s’inscrit dans une suspension générale de l’aide internationale pour une durée de 90 jours, affectant divers programmes financés par les États-Unis à travers le monde.
Des spécialistes en sécurité, recrutés sous l’administration Biden pour appuyer la mission multinationale menée par le Kenya et la Police Nationale d’Haïti, ont été informés lundi qu’ils étaient suspendus jusqu’à nouvel ordre. Cette décision s’accompagne de licenciements au sein de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) et du Bureau des stupéfiants et de l’application de la loi du Département d’État.
Impact en Haïti et ailleurs
Le Bureau des stupéfiants et de l’application de la loi, qui contribue au renforcement des forces de police à l’échelle internationale, a dû interrompre ses activités en Haïti. Cette décision survient alors que la nation caribéenne fait face à une montée en puissance des gangs armés. La police haïtienne, soutenue par des conseillers américains et kenyans, tente de contenir les violences croissantes.
L’impact de cette suspension n’est pas limité à Haïti. En Colombie, environ 250 contractuels du bureau ont été licenciés. Toutefois, l’ampleur exacte des suppressions de postes en Haïti reste floue, les autorités locales et américaines n’ayant pas précisé le nombre d’experts touchés.
Avant l’interruption de l’aide, des entreprises comme Universal Strategy Group, Inc., Celestar Holdings Corporation et Creative Corrections, LLC avaient recruté des conseillers pour améliorer la formation policière haïtienne, notamment en matière de renseignement, d’enquête et de gestion administrative. L’un de ces conseillers récemment licenciés était impliqué dans la mise en place d’un centre de commandement stratégique pour la Police Nationale d’Haïti.
Les experts américains avaient également joué un rôle crucial dans la formation des équipes d’intervention spéciales, fournissant une assistance en matière d’armement et de stratégies anti-gang. Leur retrait risque d’affaiblir davantage la capacité de réponse de la police haïtienne face aux groupes criminels qui contrôlent une grande partie du territoire.
Lundi matin, des gangs lourdement armés ont mené une attaque coordonnée dans la région de Kenscoff, près de Port-au-Prince, incendiant des maisons et poussant des centaines de familles à fuir. La violence s’est propagée jusqu’à Pétion-Ville, bastion encore épargné par les gangs. Cette offensive illustre la montée en puissance de ces groupes criminels, qui ont déjà causé la mort de plus de 5 600 personnes en 2024 et forcé plus d’un million de personnes à l’exil.
L’aide américaine représentait près de 60 % de l’assistance humanitaire en Haïti l’année dernière, finançant des programmes essentiels de santé, de lutte contre la corruption et de soutien à la sécurité. La suspension de ces fonds pourrait aggraver une crise humanitaire déjà préoccupante.
Le gel de l’aide américaine met en péril la mission de sécurité multinationale en Haïti, qui manque cruellement de ressources. Initialement prévue pour mobiliser 2 500 soldats, la mission kenyane ne compte actuellement que 800 membres. Bien que les États-Unis aient récemment envoyé une aide alimentaire par avion militaire, des équipements destinés aux forces de sécurité n’ont pas encore été livrés.
La décision de Trump s’inscrit dans une politique plus large de réduction des dépenses à l’étranger, justifiée par son approche « America First ». Le président a insisté sur la nécessité de cesser d’allouer des fonds à des pays qu’il considère comme hostiles aux États-Unis. Son secrétaire d’État, Marco Rubio, a précisé que toutes les obligations financières en matière d’aide étrangère étaient gelées en attendant une révision complète des programmes.
Le Kenya et la République dominicaine font partie des pays ayant exprimé leurs préoccupations quant aux répercussions de la suspension de l’aide. Le président kényan William Ruto a déployé 217 policiers supplémentaires en Haïti malgré l’incertitude persistante sur le financement de la mission.
Les experts estiment que l’arrêt de l’aide américaine risque d’accroître l’instabilité en Haïti et de compromettre les efforts de lutte contre le crime organisé, qui s’étend désormais au trafic de drogue à grande échelle. Avec des groupes criminels se rapprochant des cartels régionaux, la situation haïtienne devient une menace non seulement pour le pays, mais aussi pour la sécurité des États-Unis.